Des démarches juridiques simplifiées
Une transition entraîne, bien souvent, certains changements qui se confrontent aux aspects légaux. La loi française de modernisation sociale a marqué une avancée en 2016, à propos du changement de prénom et de sexe à l’état civil. Ces demandes ne sont plus subordonnées à un traitement médical ou chirurgical préexistant, ni à une évaluation psychiatrique.
A présent, le changement de prénom et le changement de la mention du sexe sont deux démarches qui peuvent être menées simultanément ou séquentiellement. Mais elles suivent toujours des règles spécifiques. En l’état de la législation et de la jurisprudence françaises, il est globalement plus facile d’obtenir le changement de prénom, que la modification de la mention du sexe.
Néanmoins, à propos des changements de prénom et de sexe à l’état civil, une trop grande place serait encore donnée à l’interprétation des textes de loi, débouchant sur des décisions inégales entre les territoires et les institutions.
Textes de référence :
- Loi du 18 novembre 2016 – Art. 60 du code civil (changement de prénom) et 61-5 à 61-8 du code civil (changement de sexe) :
- Décret n° 2017-450 du 29 mars 2017 relatif aux procédures de changement de prénom et de modification de la mention du sexe à l’état civil https://www.legifrance.gouv.fr/jorf/id/JORFTEXT000034316416
Changer de prénom à l'état civil
La loi de 2016 a vocation à simplifier le processus de changement de prénom.
Le changement de prénom est une formalité administrative qui peut s’effectuer, à présent, devant un officier d’état civil, à la Mairie du lieu de naissance ou de domiciliation. Le procédure est gratuite.
L’adjonction, la suppression ou la modification de l’ordre des prénoms peut également être demandée.
S’il s’agit d’un mineur ou d’un majeur sous tutelle, la demande est remise par son représentant légal.
Pièces à produire en accompagnement du formulaire
Identité et résidence, exemples :
- Copie intégrale originale de l’acte de naissance, datant de moins de 3 mois ;
- Pièce d’identité originale en cours de validité ;
- Justificatif de domicile récent.
Intérêt légitime de la demande, exemples (prouver l’usage du nouveau prénom au quotidien et sa correspondance avec l’identité) :
- Copies de factures, de justificatifs de domicile, attestations de proches (famille, amis, collègues…), certificat d’inscription à une activité de loisirs, cartes de fidélité, certificats médicaux indiquant les difficultés rencontrées à cause du prénom etc.
S’agissant des mineurs, si les deux parents exercent l’autorité parentale, la demande doit être renseignée/signée par les deux. Le mineur de plus de 13 ans devra joindre son consentement. Si l’autorité est exercée par un seul parent et que l’autre garde le droit de surveiller l’éducation de l’enfant et de subvenir à son entretien, alors ce parent doit être informé de la demande et la prouve jointe au dossier. Si les parents sont séparés, en désaccord… le juge aux affaires familiales doit être saisi.
S’agissant des jeunes mineurs, les décisions des services d’états civils sont encore hétérogènes. Alors que certains acceptent assez facilement le changement de prénom, d’autres refusent pour défaut d’intérêt légitime, au motif qu’un jeune enfant n’est pas suffisamment construit, physiquement et psychiquement, pour qu’un changement de genre et d’identité puisse être estimé irréversible. En cas de persévérance de la famille dans sa demande, le Procureur de la République est saisi. Il a le pouvoir d’accepter ou de refuser la demande. En cas de refus de ce dernier, de nouveau, cette décision peut être contestée devant un juge aux affaires familiales. La stupéfaction des demandeurs face à des décisions inégales est compréhensible ! C’est pourquoi, sans préjuger du fond, TRANSPARENTS invite ces instances à se rapprocher des équipes expertes, médicales notamment, afin de mûrir une position commune et d’harmoniser les décisions.L
Changer de sexe à l’état civil
La loi du 18 novembre 2016 – Art. 61-5 du code civil – dispose que : « “toute personne, majeure ou mineure émancipée, qui démontre par une réunion suffisante de faits que la mention relative à son sexe dans les actes de l’état civil ne correspond pas à celui dans lequel elle se présente et dans lequel elle est connue, peut en obtenir la modification ».
La preuve d’une « réunion suffisante de faits » peut être apportée, par tous moyens par la personne :
- se présenter publiquement comme appartenant au sexe revendiqué ;
- être connue sous le sexe revendiqué de son entourage familial, amical ou professionnel (produire des témoignages par exemple) ;
- avoir déjà obtenu le changement de son prénom afin qu’il corresponde au sexe revendiqué.
Le législateur n’a pas souhaité dresser une liste des faits pouvant venir à l’appui de la demande (limitative). Il est demandé d’apporter plusieurs faits convergents. Soit un faisceau d’indices comme : attestations de témoins, photographies, tout document permettant d’établir que le demandeur se présente et est connu(e) sous le sexe revendiqué (facture, abonnement, carte de fidélité, courrier, attestations médicales…etc.).
Pour faire valoir son changement de sexe à l’état civil, le demandeur n’est plus obligé de faire la preuve de traitements hormonaux ou d’opérations chirurgicales visant à modifier son intimité.
La modification de la mention du sexe à l’état civil, sur l’acte de naissance, est toujours une procédure judiciaire. Elle implique une comparution devant un juge et un procureur du tribunal judiciaire de son lieu de domiciliation ou de son lieu de naissance.
Il s’agit d’une procédure gracieuse et non contentieuse. L’assistance d’un avocat n’est donc pas obligatoire. Néanmoins, elle est possible. Un avocat expert en droit des personnes peut être en mesure d’établir un dossier convaincant et de le défendre afin d’obtenir le changement d’état civil souhaité par la personne. Etre ainsi accompagné est également rassurant.
Exemple de formulaire de requête devant le tribunal judiciaire de Paris :
https://www.tribunal-de-paris.justice.fr/sites/default/files/2021-02/Requ%C3%AAte%20changement%20de%20genre.pd
Egalité des chances face à l'emploi
Toute décision d’un l’employeur relative à l’emploi (embauche, promotion, sanctions, mutation, licenciement, formation etc), doit être prise en fonction de critères professionnels et non sur des considérations d’ordre personnel, fondées sur des éléments extérieurs au travail (sexe, religion, apparence physique, nationalité, orientation sexuelle ou du genre etc). A défaut, des sanctions civiles et pénales sont encourues.
L’identité de genre fait donc partie des critères discriminants prohibés pour justifier une décision relative à l’embauche ou à l’emploi d’une personne.
Les motifs et les faits constitutifs de discrimination au travail, directe ou indirecte, les possibilités d’agir en justice, les sanctions encourues etc, sont décrits dans l’article que nous vous invitons à consulter au besoin : https://travail-emploi.gouv.fr/droit-du-travail/egalite-professionnelle-discrimination-et-harcelement/article/la-protection-contre-les-discriminations.
Si les notions de discrimination, et de lutte contre les pratiques discriminantes, sont présentes dans les textes de loi, et constituent d’ailleurs l’objet d’une Haute Autorité (HALDE), la notion de diversité qui lui est souvent associée dans le langage courant, est absente de la sphère législative. Aucun texte de loi ne définit la diversité en entreprise. Chaque entreprise définit, pour elle-même, ce que signifie “promouvoir la diversité”, ainsi que les actions qu’elle veut mettre en place dans ce cadre, éventuellement consignées dans des accords d’entreprises.
Textes de référence : loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 ; loi n° 83-635 du 13 juillet 1983 ; loi n° 2012-347 du 12 mars 2012 ; loi n° 2012-954 du 6 août 2012 ; loi n° 2014-873 du 4 août 2014 ; loi n° 2016-483 du 20 avril 2016 ; loi n°2016-1321 du 7 octobre 2016 ; loi n° 2016- 1547 du 18 novembre 2016 de modernisation de la justice du XXIe siècle ; loi n° 2017-86 du 27 janvier 2017 relative à l’égalité et à la citoyenneté.
A propos du changement d’identité de genre d’un salarié, lorsqu’une personne transgenre exprime le souhait d’en changer, indépendamment de l’avancement de son parcours de transition, aucune règle ne dit dans quelle mesure l’employeur se doit d’utiliser le nouveau prénom, de modifier le titre de civilité sur tous les documents administratifs, les bulletins de salaire, les supports de communication.
Autres sujets
Inclusion scolaire
S’agissant de la mise en œuvre des changements d’identités de genre en milieu scolaire (prénom, pronom et aussi, habillement), là encore, des discordances fortes sont constatées. Il est moins question de loi, d’égalité de droits, que d’appréciations individuelles des dirigeants et des représentants de ces institutions, trop peu sensibilisés au sujet. La circulaire Blanquer tend à améliorer et à homogénéiser les pratiques : https://www.education.gouv.fr/bo/21/Hebdo36/MENE2128373C.htm
Reproduction/filiation
L’assistance médicale à la procréation est accessible pour “tout couple formé d’un homme et d’une femme ou de deux femmes ou toute femme non mariée”. Les personnes transgenres en sont-elles exclues ? Quant est-il de la filiation ? ? https://www.editions-legislatives.fr/actualite/transidentite-et-filiation%C2%A0-un-premier-positionnement-de-la-cedh/
https://www.editions-legislatives.fr/actualite/la-parente-transgenre-%C2%A0une-decision-inedite/
Privation de liberté
Quant est-il des personnes incarcérées ? Sont-elles affectées dans un quartier correspondant à leur identité de genre dès lors que ces dernières en expriment la volonté et sont engagées dans un parcours de transition, quel que soit le changement d’état civil.
Ces questions et d’autres ont été portées devant l’Assemblée Nationale en janvier 2021, dans le cadre d’une proposition de résolution : https://www.assemblee-nationale.fr/dyn/15/textes/l15b3795_proposition-resolution